La révolution est une question de sémantique et de langue

De la censure au nom de l’uniformisation ! Par Zahir Madi – 07 mars 2021
Il est essentiel et vital d’éviter l’uniformisation de la rue :
La révolution est un ensemble de cycles évolutifs, et chaque région doit initier son propre mode opératoire en réactivant l’ensemble des héritages citoyens anciennement acquis ou récents, la Kabylie gagnerait à mettre en exergue le sien en insistant sur un cycle évolutif propre à elle, et de faire appel à une dynamique conforme à la fois, à son particularisme sociolinguistique, mais aussi à son héritage militant et citoyen arraché au moyen de plusieurs décennies de luttes engagées et pacifiques.
 
Une uniformisation à l’échelle nationale des slogans et des mécanismes de luttes risquent ainsi, et par l’effet d’un empressement tactique voulu, par une frange de la rue et de ses animateurs, afin d’échapper aux contraintes circonstantielles imposées par un régime à la fois, liberticide et étouffant, de créer une relative homogénéité tant dans les moyens que dans les objectifs.
 
Quels objectifs pour quelle région ?
L’uniformisation voulue par ces mêmes animateurs dans la confection du discours politique et des visions qui en découlent, peut dans un premier temps, être considérée comme un acte unificateur en prévision de la formation d’un rapport de force homogène, le besoin imaginé de s’adresser à la rue en usant des mêmes procédés et dans des mécanismes, simplistes, déchargés d’un imaginaire fécond, et restreints dans son contenu et limité aux questions consensuelles, ceci sans risquer de tétiner le citoyen de peur de le frustrer dans son appréhension de la chose politique actuelle, peut décourager plus d’un.
 
La motivation qui anime ces animateurs de réaliser une rhétorique, sensiblement combinée pour être partagée par l’ensemble des algériens peut s’avérer, une stratégie gagnante, mais non dépourvue de risques et de conséquences désastreuses pour le bien de la Révolution, de son évolution dans le temps et du fait de devoir limiter ses réalisations à des demandes très archaïques, conservatrices et anti-progressistes, ainsi, la Révolution risque de dévorer son cycle évolutif imaginé par l’écrasante majorité des citoyens désirant un passage vers une nouvelle ère de citoyenneté libérée des contraintes ultra-conservatrices.
 
En outre, les disparités héritées et observées entre les régions depuis des décennies, dans la conception du discours politique, risquent d’être réduites à des faits sociaux inexploitables et sans portées dans leur possibilité de faire émerger de nouvelles demandes socioculturelles de type progressistes, dans ces régions, plus précisément qui se rendent disponibles à cette demande socioculturelle, la motivation de plaire risque de lasser beaucoup de monde et de contraindre d’autres, à abandonner des décennies de luttes, de militance au profit d’un attentisme social dicté par des impératifs idéologiques (Code la famille, égalités des sexes, financement des lieux de culte..)
 
De ces questions épineuses et qui présentent un risque majeur de scinder la rue, substantiellement en deux sphères antagonistes, la question des droits de la personne, de la liberté de croyance et de la place de la religion dans la sphère publique ne bénéficient pas encore d’une même appropriation à l’échelle du pays, et toute tentative de produire un discours politique uniforme et de le rendre homogène, de sorte à être destiné à l’ensemble des citoyens du pays, va indiscutablement, nécessiter des allègements, voire, d’opérer un nivellement par le bas au profit d’une majorité, foncièrement , considérée indisponible encore pour un tel effort socioculturel, et qu’en est-il des régions qui se sont rendues disponibles pour de telles évolutions ? De la censure au nom de l’uniformisation !
À suivre..
 
La révolution est une question de sémantique et de langue.
Zahir Madi.