170 heures au Tassili – Désert amazigh, Algérie

Le Tassili

170 heures au Tassili :
Nous étions une douzaine de personnes (femmes et hommes) à chercher la détente dans l’aventure de la traversée pédestre du Tassili. Nous étions aussi issues de différents horizons géographiques (Est, ouest, centre et sud de l’Algérie et même d’Europe) et de milieux professionnelles très hétérogènes. Bien sûr avec au moins deux points communs : Adepte de la randonnée et amoureux du grand sud algérien.

 

Après deux heures d’avion (du sud de la méditerranée jusqu’aux environs du tropique du Cancer) le groupe atterrit. Conduit ensuite par des véhicules 4×4 jusqu’à la limite de la piste carrossable atteinte vers 4h du matin : ça sera le premier lieu de bivouac.
Notre trek commence après le petit-déjeuner, le long d’un oued desséché de l’aval vers l’amont avant le quitter au bout de quelques trois kilomètres et de commencer un sentier rocailleux et escarpé. Vers le milieu de journée nous avons atteint le premier plateau où nous avons fait une halte suivi du déjeuner
Nous sommes accompagnés constamment par notre guide Amine (la soixantaine bien entamée) lucide, parfois anxieux lorsque quelqu’un de nous s’écarte trop du groupe ou ne suit pas les consignes. Il a partagé avec nous des récits terrifiants (qui l’ont traumatisé) qui soulignent clairement que se perdre dans le désert peut conduire facilement à la mort.
 
Durant les sept jours qu’a duré notre traversée, les ânes et leurs convoyeurs assurant la logistique refaisaient le même rituel: ils nous devancent en empruntant des raccourcis (au besoin notre guide nous fait retarder en nous faisant découvrir un peu plus de facettes des paysages féeriques plus merveilleuses les unes des autres.
 
Les porches œuvres d’art naturelles taillés dans les rochers nous servaient à chaque halte d’abri : soit pour manger, boire du thé ou bien sûr pour y installer sa tente.
 
Le groupe marche une moyenne de 12 km par jour avec des pointes de 18km à des altitudes autour de 1400 m et des pics dépassant les 1700m. La caravane d’une vingtaine d’ânes avec leur convoyeurs (dont Mouni est le plus âgé : toujours disponible et souriant) assure le transport de tout : les bagages des randonneurs, le bois pour la cuisson, le stock de denrées alimentaires et bien sur l’eau vitale en ces milieux arides.
 
 
Un seul point d’eau a été vu durant tout notre périple ( les autres ont taris en raison de la sècheresse sévère que connait la région) : c’est la Guelta Ouane Elmina.
 
Une synergie remarquable : Sans le guide on ne saura pas par où passer, sans la logistique assurée par les ânes et leurs convoyeurs on ne pourra tenir et aller nulle part.
Le Tassili : Des paysages digne du film Star Wars ou de la planète Mars:
Des plateaux gigantesques accessibles par des chemins escarpés. Des cagnons immenses et profonds de centaines de mètres à proscrire aux personnes qui ont des vertiges
De multiples rivières desséchées par l’absence de pluies dont les lits sablonneux sont clairsemés de plantes et arbres du désert (en plus du cyprès du Tassilli et autres arbustes nous avons trouvé un olivier sauvage ! (Ahechad ) inattendu à cette latitude pour moi.
 
Une faune très discrète : Des lézards et quelques oiseaux sont rencontrés et des traces ( traces de passages sur le sable et des crottes datant de quelques heures) de gazelles et mouflons et un grand dromadaire en liberté (impossible à approcher) rencontré l’avant dernier jour sur la route d’Idjabaren.
 
Et bien sûr les fameuses grottes (ou semi grottes : porches ) abritant les célèbres peintures rupestres décrivant des scènes de vies : allant de celles de chasses aux rituelles funéraires ou de vénération…
 
Beaucoup d’autres peintures représentent des animaux : Des antilopes, des vaches, des girafes, et parfois des chevaux attelés à des chars (style de la Rome antique).
 
Ces peintures multimillénaires sont des témoins de vies intenses dans ces espaces géographiques jadis florissants (actuellement arides et hostiles) ont fait l’objet de beaucoup de travaux de recherches .
 
Le parc du Tassili est classé depuis 1982 au patrimoine mondial et réserve de biosphère depuis 1986 par l’UNESCO. Il est, par le nombre de ses gravures rupestres, le premier site à l’échelle mondiale. Il abrite également la vallée d’Iherir, classée site Ramsar depuis le 2 février 2001.
 
Le parler des Touaregs présente beaucoup de similitudes avec le parler Kabyle et autres contrées berbérophones, exemples constatés lors de notre séjour de sept jours : Times : feu, Adar : pied, tit : œil, tughmas : dents, taghat : chèvre ou brebis, tikhsi : brebis ou chèvre, ighid : chevreau, uregh : or, isgharen : bois de chauffe, adad : doigt, abrid : chemin, siwel : appel, tafoukt : lumière du soleil, … ça dénote l’étendue du territoire berbérophone (amazighe) de l’Afrique du nord.
 
La vie des Touaregs : En complète symbiose et harmonie avec la nature : Ils vivent heureux sans les moyens (qu’on dit) modernes. Ils se contentent de peu (le juste nécessaire)
jusqu’à leurs tombes qui sont faites de pierres récupérées des environs immédiats et qui se fondent en définitif avec le milieu.
 
Au bout de sept nuits et sept jours à travers les lieux magiques du Tassili, nous avons enregistrés à nos compteurs environs une centaine de kilomètres parcourus à pied et tellement ressourçant que ça nous donne une envie d’éterniser le séjour. Grand bravo aux participants et note complète aux organisateurs.
 
Hélas il faut renter et rejoindre la vie quotidienne et espérer pouvoir trouver la possibilité de refaire une expérience aussi magnifique.
 
Par Salah Abdous