Le diktat des insulteurs

Le diktat des insulteurs
Par Dr Hocine Toulait , 2021-05 – 13
 
J’écris ces quelques mots en écho au à la réflexion de M. Hamid Salmi qui a suivi le cri du cœur de M. Hacène Hireche.
 
C’est vrai. Combien d’intellectuels, artistes et autres personnalités kabyles ont souffert et continuent de souffrir de la violence de leurs pairs ou de l’invective de ceux qu’ils essaient d’éclairer avec leur art ou leur savoir. Je vous invite à penser un instant à la liste des artistes et personnalités que vous connaissez et vous vous rendrez rapidement compte que personne, absolument personne, n’a réussi à échapper à cette arme destructrice qu’est l’insulte. Les polices politiques doivent mourir de rire qu’il y ait tant de gens qui font le travail à leur place et qui le réussissent si bien. L’armée des insulteurs embusqués derrière leur clavier d’ordinateur ou carrément de fausses identités (pseudonymes) fait un ravage chez les élites kabyles. Elle sévit dès que l’opinion sort moindrement du cadre que ces insulteurs imposent à la réalité avec des jugements souvent forgés par des désirs, des sentiments ou tout simplement des ouï-dire.
 
Idir, lui aussi,  n’a pas été épargné.

 
Tout le monde s’accorde à dire que la diversité des perspectives et des points de vue crée la richesse et permet d’avoir un jugement éclairé. C’est tout l’intérêt de la diversité d’éclairages et des points de vue. Seulement, quand la violence verbale s’y mêle, la voie des insulteurs l’emporte sur ceux que l’éthique personnelle ou l’éducation empêche de faire usage de l’insulte et l’invective. Les insulteurs bombent alors le torse en signe de victoire sur le savoir et la raison, sous les applaudissements des « j’aime » des « p’tits amis de FB ».
 
Et pourtant, la différence des points de vue est en soi une source de lumière et il est bien connu que cette diversité est une richesse. Là où le bât blesse aujourd’hui, est que la peur de l’insulte et de la diabolisation musellent la vraie diversité pour laisser toute la place à l’unicité des propos insignifiants. En bout de ligne, les plus avertis finissent par se taire de peur de créer autour de leur propre personne un jeu d’ombres grotesques qui finit par éteindre toutes leurs lumières. Heureusement pour nous, plusieurs d’entre eux continuent de nous éclairer avec force, et ce, malgré tout ce qu’ils subissent. Mais…, jusqu’à quand?
 
À tous ces artistes et personnalités qui se sentent muselés par les insulteurs, j’exprime ma gratitude pour leurs éclairages avertis et la générosité avec laquelle ils partagent leurs savoirs. J’exprime mon entière solidarité à ceux d’entre eux qui se sentent blessés par la véhémence des insultes motivée ou ignorantes. Ne vous inquiétez pas chers amis, vos chagrins s’effaceront le jour où vous quitterez ce bas monde pour un silence éternel. Ceux-là même qui vous insultent aujourd’hui vous pleureront demain comme à chaque fois qu’on perd un des piliers de notre culture.
 
Si les morts pouvaient parler, ceux de nos grands artistes ou personnalités kabyles qui ont quitté ce monde (malheureusement nombreux ces dernières années) vous conseilleraient de continuer à nous éclairer de vos lumières sans tenir compte des affres de la noirceur.
Réveillons-nous avant que ça ne soit trop tard.
 
Dr Hocine Toulaït